DEVENIR PLUS CONSCIENT

 

Dans la vie ordinaire, les mouvements vitaux : colère, désir, avidité, sexe, etc., sont admis comme des choses naturelles, permises, légitimes, qui font partie de la nature humaine. C'est seulement dans la mesure où la société les réprouve, fait pression pour qu'elles soient maintenues dans des limites fixes ou soumises à une retenue décente ou mesurée que les gens essaient de les maîtriser pour se conformer au niveau de moralité ou aux règles de conduite de leur société. Ici [à l'Ashram de Sri Aurobindo], au contraire — comme dans toute vie spirituelle — on exige la conquête et la maîtrise complète de ces mouvements. C'est pourquoi le combat est plus durement ressenti : non parce que ces mouvements se soulèvent plus vigoureusement dans les sâdhaks que dans les humains ordinaires, mais à cause de l'intensité de la lutte entre le mental spirituel, qui exige la maîtrise, et les mouvements vitaux qui se rebellent et veulent continuer à agir dans la vie nouvelle comme dans l'ancienne. Quant à l'idée que la sâdhanâ [la pratique du yoga] fait surgir des mouvements de ce genre, sa seule vérité est d'abord que l'homme ordinaire porte en lui bien des choses dont il n'est pas conscient, parce que le vital les dissimule au mental et les satisfait sans que le mental comprenne quelle force fait mouvoir l'action ; ainsi tout ce qui est accompli sous un prétexte d'altruisme, de philanthropie, de service, etc., est largement motivé par l'ego qui se dissimule derrière ces justifications ; dans le yoga, il faut faire sortir le motif secret de derrière le voile, le mettre en évidence et s'en débarrasser. Deuxièmement, dans la vie ordinaire, certaines choses sont refoulées et restent tapies dans la nature, refoulées mais non éliminées ; elles peuvent apparaître à tout moment ou s'exprimer sous diverses formes nerveuses, ou par d'autres désordres du mental, du vital ou du corps, sans que leur véritable

    



cause apparaisse au grand jour. C'est la récente découverte que quelques psychologues européens ont exposée avec une grande force, et même une certaine exagération, dans une science nouvelle appelée psychanalyse. Dans la sâdhanâ aussi, il faut être devenu conscient de ces impulsions refoulées pour les éliminer ; on peut dire qu'elles se soulèvent, mais cela ne signifie pas qu'elles doivent se soulever dans les actes ; elles doivent seulement se lever devant la conscience pour que l'on puisse les éliminer de l'être.

      Certains sont capables de se maîtriser, d'autres se laissent emporter ; c'est une question de tempérament. Certains sont sattwiques et la maîtrise leur vient aisément, du moins jusqu'à un certain point ; d'autres, qui sont plus râdjasiques, éprouvent beaucoup de difficulté à se maîtriser et en sont souvent incapables. Certains ont un mental fort et une volonté mentale vigoureuse, d'autres ont un caractère vital et chez eux les passions vitales sont plus fortes et davantage à la surface. Certains ne jugent pas nécessaire de se maîtriser et se laissent aller. Dans la sâdhanâ, la maîtrise mentale ou morale doit être remplacée par la maîtrise spirituelle, car cette maîtrise mentale est seulement partielle : elle maîtrise mais ne libère pas ; seule la maîtrise psychique et spirituelle peut le faire. C'est, à cet égard, la principale différence entre la vie ordinaire et la vie spirituelle.78

 



L'humanité traverse à l'heure actuelle une crise évolutive qui secrètement recèle le choix de sa destinée ; car le mental humain est parvenu à un stade où il a accompli un immense développement dans certaines directions, tandis qu'en d'autres il est arrêté et, désorienté, ne peut plus trouver son chemin. Toujours actifs, le mental et la volonté vitale de l'homme ont érigé une structure de la vie extérieure, ingouvernable par son énormité et sa complexité, qui est mise au service de ses impulsions et de ses exigences mentales, vitales et physiques ; il a édifié une machine politique, sociale, administrative, économique et culturelle compliquée, des moyens collectifs organisés pour sa satisfaction intellectuelle, sensorielle, esthétique et matérielle. L'homme a créé un système de civilisation qui est devenu trop énorme pour pouvoir être utilisé et manié par ses facultés limitées de compréhension mentale et par ses facultés spirituelles et morales encore plus limitées — c'est un serviteur trop dangereux de son ego fourvoyé et de ses appétits. Car aucune vision mentale plus haute, aucune âme de connaissance intuitive n'est encore venue, à la surface de sa conscience, utiliser cette abondance matérielle élémentaire de la vie pour en faire la condition d'une libre croissance vers quelque chose qui la dépasse. Par son pouvoir de libérer l'homme de l'obsession incessante de ses besoins économiques et physiques insatisfaits, cette nouvelle richesse des moyens d'existence pourrait être une occasion de poursuivre à loisir des buts plus larges qui dépassent l'existence matérielle, et de découvrir une vérité, une beauté et un bien plus élevés, un esprit plus grand et plus divin qui pourrait intervenir et se servir de la vie pour donner à l'être une plus haute perfection ; mais au lieu de cela, cette richesse sert à la multiplication des besoins et à l'expansion agressive de l'ego collectif. En même temps, la science a mis à la disposition de l'homme de nombreux pouvoirs de la Force universelle, et grâce à elle, la vie humaine est devenue une sur le plan matériel ; mais ce qui utilise cette Force universelle, c'est un petit ego humain

 


rien d'universel dans ses mouvements ou dans la lumière de sa connaissance, aucun sens ou pouvoir intérieur qui créerait, dans ce rapprochement physique du monde humain, une véritable unité de vie, une unité mentale ou une unité spirituelle.79

 

 

 

 

 

 

 


 

N'oubliez jamais, même pour un moment, que tout cela a

été créé par Lui hors de Lui-même. Non seulement II est

présent en toutes choses, mais II est toutes choses. Les

différences n'existent que dans l'expression et la

manifestation. Si vous oubliez cela, vous perdez tout.

                                                                 - Sri Aurobindo

 

Prière pour la Paix

 

Que ta paix, Seigneur, demeure en moi, telle une bénédiction

à travers les orages et les ravages du Temps

pour l'âme magnifique de l'homme sur la terre.

Ton calme, Seigneur, qui porte la caresse de ta joie.

                                                                   - Sri Aurobindo

 

 

      



 

Mental et maladies

 

La maladie reviendra toujours dans le corps si l'âme est

défectueuse, car les péchés du mental sont la cause secrète

des péchés du corps. De même, la pauvreté et les

difficultés affligeront toujours l'homme en société tant

que le mental de l'espèce humaine sera soumis à l'égoïsme.

                                                                  - Sri Aurobindo

 

Sri Aurobindo dit :

      «Les maladies se prolongent inutilement et se terminent par la mort plus souvent qu'elles ne le devraient, car le mental du malade soutient la maladie du corps et s'appesantit sur elle. »

            Et j'ajoute :

« Toute maladie du corps est toujours l'expression extérieure et la traduction d'un désordre, d'une disharmonie de l'être intérieur ; à moins que ce désordre intérieur ne soit guéri, la guérison extérieure ne saurait être complète ni définitive. »

                                                                              - La Mère